Documenter les défis du miaphysisme tardo-antique
Colloque international
17/18 mars 2022
Colloque international
17/18 mars 2022
Entre 536 et 588 (date probable de la mort de Jean d’Éphèse), un événement historique frappant et inattendu se produit à l’échelle de l'Empire romain chrétien d'Orient : la restructuration d'une importante Église institutionnelle (principalement en Syrie, en Mésopotamie et en Egypte) et à ses frontières (voire même au-delà, jusqu'au Soudan moderne). Basée sur une affirmation miaphysite (une seule nature incarnée de Dieu le Verbe) résolument distinguée du dogme officiel, cette communauté doit justifier son existence (sur les plans théologique, canonique et historique) et développer sa dynamique. En effet, il devient alors de plus en plus clair que l'empereur continuera à promouvoir la communauté chalcédonienne comme l'Eglise officielle. Sans soutien du souverain et même parfois persécutée, la communauté miaphysite entend néanmoins continuer à perpétuer son action. Ce processus offre donc la rare opportunité d'observer les modalités d'une "reconstruction de l'Église", qui cherche toujours à maintenir un lien fort avec son passé et ses traditions. Ainsi donc un important effort est alors consenti pour doter les Églises miaphysites d’une armature doctrinale et canonique, au moment où elles sont confrontées à des défis vitaux. Il convient donc d’examiner cette entreprise en profondeur. Car elle a pour caractéristique de viser à faire mémoire d’un passé récent encore, à l’exploiter aussi, pour définir une identité collective. Aussi notre réunion aura-t-elle vocation à considérer l’ampleur et la variété de ce corpus ainsi que ses caractéristiques. Ou pour le dire autrement, elle cherchera à répondre aux questions suivantes : comment se constituent les fonds, quelle en sont les dimensions, comment sont-il rendus accessibles (langue et part des traductions), qui prend l’initiative de les réunir ou d’y puiser ? Selon quel agenda ? Selon quels critères ? Dans quel but ? S’agit-il seulement de produire les documents en misant sur une démonstration implicite servie par le choix et la mise en ordre du compilateur ? Ou bien faut-il insérer les pièces dans un récit explicatif, quitte à les découper ou les abréger ? Jusqu’à quel point ? Selon quels modèles ? Quelles relations ces collections et narrations entretiennent-elles les unes par rapport aux autres (interaction, complément, contradiction, réfutation, substitution...) ? Pourquoi sont-elles préservées à leur tour ? Et quel usage peut encore en être fait lorsque certains des manuscrits sont recopiés dans le contexte de la domination arabo-musulmane, au VIIIe et IXe s. ?
Between 536 and 588 (the probable date of the death of John of Ephesus), a striking and unexpected historical event occurred on the scale of the Eastern Christian Roman Empire: the restructuring of an important institutional Church (mainly in Syria, Mesopotamia and Egypt) and on its borders (even beyond, as far as modern Sudan). Based on a miaphysite affirmation (one incarnate nature of God the Word) resolutely distinguished from the official dogma, this community had to justify its existence (theologically, canonically and historically) and develop its dynamics. Indeed, it becomes increasingly clear that the emperor will continue to promote the Chalcedonian community as the official church. Without the support of the sovereign and even sometimes persecuted, the Miaphysite community nevertheless intends to continue its action. This process thus offers the rare opportunity to observe the modalities of a "reconstruction of the Church", which always seeks to maintain a strong link with its past and its traditions. Thus, an important effort is made to provide the Miaphysite Churches with a doctrinal and canonical framework at a time when they were facing vital challenges. It is therefore appropriate to examine this undertaking in depth. For it is characteristically aimed at remembering a still recent past, and also at exploiting it, in order to define a collective identity. Our meeting will therefore consider the extent and variety of this corpus as well as its characteristics. Or to put it another way, it will seek to answer the following questions: how are the collections constituted, what are their dimensions, how are they made accessible (language and share of translations), who takes the initiative to gather them or to draw from them? According to what agenda? According to what criteria? With what purpose? Is it only a matter of producing the documents by relying on an implicit demonstration served by the compiler's choice and arrangement? Or should the pieces be inserted into an explanatory narrative, even if it means cutting them up or shortening them? To what extent? According to which models? How do these collections and narratives relate to each other (interaction, complement, contradiction, refutation, substitution...)? Why are they preserved in turn? And what use can be made of them when some of the manuscripts are copied in the context of Arab-Muslim domination, in the 8th and 9th centuries?